• La liste des offres de reclassement doit indiquer les critères de départage (Cass. soc., 8 janv. 2025, n° 22-24.724)
Depuis les ordonnances Macron de 2017, l’employeur a le choix : soit il adresse de manière personnalisée les offres de reclassement interne à chaque salarié, soit (depuis 2017) il diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés (C. trav., art. L.1233-4 al 4). Dans ce dernier cas, la liste précise les critères de départage entre salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste, ainsi que le délai dont dispose le salarié pour présenter sa candidature écrite, qui ne peut être inférieur à quinze jours (C. trav., art. D.1233-2-1 III).
Si la liste ne comporte pas les critères de départage, l’offre est imprécise « en ce qu’elle ne donne pas les éléments d’information de nature à donner aux salariés les outils de réflexion déterminant leur décision »
Le manquement de l’employeur à son obligation de reclassement est caractérisé. Le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Peu importe que les critères de départage figurent dans le PSE
Peu importe que les salariés n’aient candidaté à aucune offre.
Pour mémoire
L’offre de reclassement ne doit omettre aucune des mentions légales : l’intitulé du poste et son descriptif ; le nom de l’employeur ; la nature du contrat de travail ; la localisation du poste ; le niveau de rémunération ; la classification du poste. Si l’une de ces mentions manque, l’offre est jugée imprécise, ce qui caractérise un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement. Le licenciement est sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 23 oct. 2024, n° 23-19.629).
• Une convention collective peut minorer une indemnité de licenciement en fonction de l’âge (Cass. soc., 8 janv. 2025, n° 23-15.410)
En l’espèce, la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoit une minoration du montant de l’indemnité de licenciement à compter de l’âge 61 ans :
À un moment où l’âge de départ à la retraite à taux plein était fixé à 60 ans
La minoration ne peut aboutir à porter l’indemnité conventionnelle de licenciement à un montant inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement.
La discrimination en raison de l’âge n’est pas caractérisée car :
Cette minoration de l’indemnité conventionnelle de licenciement poursuit un objectif légitime en ce qu’elle a pour finalité d’inciter au départ les salariés ayant atteint l’âge de la retraite pour favoriser le partage du travail entre les générations et l’insertion des jeunes travailleurs
La minoration n’est pas disproportionnée, car les travailleurs, malgré leur âge, bénéficient d’une couverture économique qui n’est pas déraisonnable au regard de la finalité recherchée de politique de l’emploi. De plus, le mode de calcul n’est pas manifestement inapproprié pour atteindre cet objectif.
Le raisonnement de la Cour de cassation, fondé sur l’article L. 1133-2 du Code du travail, est directement issu du droit de l’Union européenne (article 6, § 1, premier alinéa, de la directive 2000/78/CE du conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ; voir aussi (CJUE, 6 décembre 2012, Baxter, aff. C-152/11).
• L’étendue de la mission de l’expert-comptable mandaté par le CSE dans le cadre de la consultation sur la situation économique et financière (Cass. soc., 8 janv. 2025, n° 23-19.403)
L’expertise du CSE en vue de la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l’entreprise ne peut porter que sur l’année qui fait l’objet de la consultation et les deux années précédentes ainsi que sur les éléments d’information relatifs à ces années.
Cet arrêt se cale sur les périodes prévues par le code du travail en l’absence d’accord (C. trav., art. R. 2312-10).
• La reconnaissance du harcèlement moral institutionnel au pénal (Cass. crim., 21 janv. 2025, n° 22-87.145 ; C. pén. art. 222-33-2)
A l’occasion de l’affaire des suicides France Télécom, la chambre criminelle de la Cour de cassation sanctionne pénalement les dirigeants de la société pour avoir déployé une politique d’entreprise qui, en connaissance de cause, conduit à une dégradation des conditions de travail de tout ou partie de leurs salariés.
A retenir
Il n’est pas exigé que les agissements reprochés concernent un ou plusieurs salariés en relation directe avec leur auteur ni que les salariés victimes soient individuellement désignés. Le dirigeant peut ne pas connaître personnellement les salariés visés par cette politique,
Les juges ne contrôlent pas l’opportunité d’une politique d’entreprise, qui relève du pouvoir de direction. En revanche, ils examinent la méthode utilisée pour la mettre en oeuvre afin de déterminer si elle excède le pouvoir normal de direction et de contrôle du chef d’entreprise.
Pour mémoire
La chambre sociale de la Cour de cassation a consacré la notion de harcèlement moral managérial dès 2009 (Cass. soc., 10 nov. 2009, n°07-45.321).
• Plus de souplesse sur l’avis d’inaptitude à tout emploi (Cass. soc., 12 févr. 2025, n° 23-22.612)
Délivré par le médecin du travail, l’avis d’inaptitude à tout emploi dispense l’employeur de rechercher un reclassement, que l’inaptitude du salarié soit d’origine professionnelle (C. trav., art. L. 1226-12) ou non professionnelle (C. trav., art. L. 1226-2-1). Dans cette hypothèse, le médecin du travail doit cocher une des deux cases suivantes :
- soit « le maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ;
- soit « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
À la suite de l’arrêt du 12 février, il peut désormais utiliser une formule équivalente à la formule légale, il n’est plus tenu de la reproduire à l’identique. En l’espèce, le médecin du travail avait indiqué : « inapte à la reprise du poste occupé. L’état de santé du salarié ne permet pas de faire des propositions de reclassement au sein de l’entreprise filiale et holding compris et le rend inapte à tout poste. ». La Cour de cassation valide.