11 septembre 2024 Pourvoi n° 23-10.460
Dans le cadre d’un licenciement pour motif économique pour cause de cessation d’activité, un employeur propose des offres de reclassement interne à des salariés sur des postes disponibles au sein du groupe. Ces propositions consistaient en une invitation aux salariés à se porter candidat sur le(s) poste(s) proposé(s). Elles précisaient qu’en cas de candidature, un entretien pourrait être organisé avec une personne dédiée pour s’assurer de la compatibilité de leurs capacités avec l’emploi auxquels ils ont candidaté.
La Cour d’appel de Reims avait considéré que ces propositions n’étaient pas des propositions sérieuses en ce qu’elles invitaient les salariés à se porter candidat. La Cour d’appel ne s’est donc pas prononcée sur le point de savoir si l’entretien prévu, en cas de candidature, pour vérifier les compétences du salarié pouvait invalider l’offre de reclassement.
Dans son pourvoi, la société faisait notamment valoir que ce processus était valable et que les sociétés du groupe étaient en droit d’exiger d’apprécier elles-mêmes, à l’issue d’un entretien individuel, l’adéquation du profil du salarié avec les postes à pourvoir en leur sein.
C’est sur ce point que la Cour de cassation est intéressante
Contrairement, à la Cour d’appel, la Cour de cassation ne considère pas que le fait d’inviter des salariés à se porter candidat sur les postes de reclassement proposés est de nature à rendre la proposition de reclassement irrégulière.
Si elle confirme in fine la position de la Cour d’appel, elle s’appuie sur le fait que l’entretien prévu dans le processus de reclassement interne pour vérifier l’adéquation du profil des salariés n’avait pas pour objet de départager des salariés ayant accepté le même poste de reclassement :
« En l’état de ces constatations, dont il ne ressortait pas que cette procédure de recrutement devait permettre de départager les salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste, la cour d’appel a pu en déduire que ces offres, qui n’étaient pas fermes et ne garantissaient pas le reclassement effectif du salarié en cas d’emploi disponible dans le groupe, ne répondaient pas aux exigences légales. »
Cette décision s’inscrit dans le prolongement d’une précédente décision de 2015, dans laquelle elle avait déjà considéré que « les offres de reclassement adressées aux salariés précisai[nt] que le recrutement devait être validé par le responsable recrutement pour la France du groupe Quintiles et le manager du département concerné, la cour d’appel en a exactement déduit que ces offres qui n’étaient pas fermes et ne garantissaient pas le reclassement effectif du salarié en cas d’emploi disponible dans le groupe » (Cass. Soc, 28 janvier 2015,13-23.440).
Dis autrement, une offre de reclassement proposée dans le cadre d’un processus de reclassement impliquant une vérification a posteriori de l’adéquation du profil du salarié au profil du poste de reclassement n’est pas une offre de reclassement valable. L’employeur est censé avoir vérifié avant la proposition que le poste de reclassement est compatible avec les compétences du salarié , même si ce poste est situé dans une autre société du groupe.
En revanche, en cas d’acceptation du poste de reclassement par plusieurs salariés, un entretien de départage peut être prévu.
Cet entretien devra toutefois permettre d’établir les critères objectifs de choix du salarié retenu, conformément à une précédente décision, du 14 février 2024 (n°23-12.092), dans laquelle la Cour de cassation a indiqué qu’« en cas de candidatures multiples sur un même poste de reclassement proposé à plusieurs salariés , l’exécution de bonne foi de l’obligation de reclassement par l’employeur, si elle est contestée, suppose qu’il justifie des raisons objectives, l’ayant conduit à refuser au salarié concerné le reclassement dans l’emploi vacant ».